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  • Le Blog de L'Abc Littéraire vous informe de la création d'une nouvelle rubrique ainsi que 2 nouveaux articles.

    La rubrique comportera les fiches de vocabulaire d'ancien français avec l'origine du mot étudié, sa valeur et son sens en ancien français ainsi que son évolution au fil du temps, jusqu'au français moderne.

    Vous pouvez, désormais, retrouvez une première fiche de vocabulaire sur le terme ENGIN/Angin , ainsi qu'un commentaire sur un passage de La lettre écarlate de N. Hawthorne.

     

    Sur ce, bonne lecture et à bientôt sur le blog ou le forum.

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  • La Lettre écarlate N. Hawthorne – Commentaire d’un passage -

     

    La Confession et la mort, page 350 à 358 (Folio) « Comme les hommes d’armes » à la fin.

     

                Le dénouement du roman repose sur un retournement soudain. H. & D. ont prévu de s’enfuir le lendemain du jour du sermon qui doit saluer l’élection du nouveau gouverneur. On sait déjà, cependant, que la fuite ne donnera pas aux amants la liberté, puisque C. part avec eux. Or, D. choisit brutalement le seul salut véritable : l’aveu.

                1/ Le caractère subit de cette décision en fait un véritable miracle ; c’est ainsi d’ailleurs que la scène est décrite : D. revit la Passion du Christ.

                2/ Le dénouement du roman forme un diptyque avec l’ouverture : la foule est rassemblée sur la Place du Marché (pour une punition / pour une fête), le narrateur se moque des puritains ou au contraire peint une atmosphère empreinte d’horreur religieuse, le tableau de la Madone à l’enfant (H. & P.) est complété par celui du Christ en croix (D. au pilori). Comparaison incipit/ excipit à mener.

                3/ La fin propose ainsi un rachat : D. agit comme il aurait dû le faire sept ans auparavant. Le mouvement du texte suit le parcours christique de D. du chemin de croix à la mort. Une rédemption en guise de conclusion ?

     

     

    I.                   La « Passion » de Dimmesdale

    A.    Les étapes de la Passion

    -  La marche de D. parmi la foule, vers le pilori : à mettre en parallèle avec les « stations » du chemin de croix (c’est à dire les arrêts du christ pendant la montée au calvaire). Deux « stations » ici, où deux dignitaires, le révérend Wilson et l’ex-gouverneur Bellingham proposent leur aide au pasteur chancelant. Parenté de cette marche avec une agonie : le narrateur précise que D. est déjà presque mort (page 350 « on aurait à peine cru que c’était un homme vivant… »).

    -  La dernière tentation de D. (page 352), par C., est repoussée en des termes explicites « Ah ! tentateur ! tu arrives trop tard ».

    -  La montée du pilori : la crucifixion.

    -  Le pardon aux ennemis : « Dieu veuille te pardonner ! » Cf. « Pardonne leur, Père, ils ne savent pas ce qu’ils font. » (Cf. Bible, Luc, 23, 34).

    -  La mort suit le discours, où D. s’est confié à Dieu. Cf. « Père, dans tes mains je remets mon esprit. » (Luc, 23, 46).

    B.     Une iconographie religieuse

    Le pasteur monte au pilori au moment où le soleil est presque à son Zénith comme une « gloire » (auréole enveloppant le corps du Christ). D. dans le soleil du jugement de Dieu, pause hiératique et solennelle qui en fait une figure sacrée (page 355). Lorsque D. s’affaisse sur le plancher du pilori, H. appuie sa tête contre sa poitrine : cf. les descentes de croix en peinture, les Pieta ( la vierge et le Christ ).

     

    C.    Le dernier sermon de Dimmesdale

    Dimmesdale vient de prononcer un sermon et de connaître un succès triomphal comme pasteur de la communauté. C’est le jour de son plus grand triomphe qu’il choisit de se présenter comme le plus grand pêcheur.

     

    Son aveu se fait par des gestes symboliques (monter sur le pilori avec H. & P.), mais aussi par une parole adressée à l’ensemble du « Peuple de la Nouvelle Angleterre » = un nouveau sermon en quelque sorte, mais cette fois-ci, le lecteur prend connaissance de son contenu. Du premier sermon en effet (page 347 348), le lecteur sait seulement son éloquence miraculeuse, et son contenu nationaliste (Dieu participe à la fondation de l’Amérique). Mais ce discours n’est pas donné au style direct, peut être – parce qu’on ne peut transcrire en mots écrits une parole magique, d’autant plus quand elle est dite d’inspiration divine.

    Parce que ce n’est pas là une parole entièrement humaine : l’humanité, chez Hawthorne, ne peut se séparer du péché et du mal. Le seul style « direct » qu’on puisse avoir = la confession des fautes…

     

    Paradoxalement, D. est toujours un prêtre et un saint, au moment même où il dit qu’il n’en est pas un. C’est lui qui réconforte H., pardonne à C., et permet un rachat.

     

     

    II.                Un miracle qui propose un rédemption universelle

     

     

    A/ Un Instant magique

    Un moment de grâce délimité dans le temps et l’espace et marqué par le sacré cf. miracles.

     

    B/ Rédemptions individuelles

    D. ne sauve pas seulement son âme.

    Son sacrifice rachète Pearl, qui, par le baiser qu’elle échange avec son père, devient humaine. Page 357 : être humain, pour H., c’est être capable de souffrir et de compatir.

    D. terrasse le diable en C. page 357 == le mal disparaît pour un moment de la terre ; ne reste que la souffrance.

     

    C/ Une Rédemption collective

    La mort de D. met en valeur un nouveau regard sur la communauté puritaine, qui n’est plus la foule mesquine et méchante qu’elle était au début de la fête. Les Bostoniens sont envisagés comme un groupe solidaire où ont disparu les égoïsmes individuels. Fusion dans le sentiment d’appartenance à une communauté, qui ressent les mêmes sentiments : « béante de stupeur et d’émotion religieuse » page 351, « le peuple dont le vaste cœur était frappé d’épouvante et débordait pourtant d’une sympathie éplorée » page 354, « le regard de la multitude, frappé d’horreur » page 356, surtout le dernier paragraphe, page 358 « l’horreur et la terreur sont ici des émotions religieuses sacrées, devant la grandeur divine qui dépasse l’homme. Une terreur mêlée de compassion : le sens premier du mot religio est retrouvé (« relier »). La fin du texte : le sourd murmure de la foule accompagne le dernier souffle de D. comme le cœur dans la tragédie grecque, le personnage collectif accompagne de son triste chant tragique du héros…

     

     

    III.             Et pourtant une révélation incomplète

     

    A/ Ce que le texte laisse dans l’ombre : ellipses

     

    La scène est construite autour du moment intensément dramatique où quelque chose apparaît sur la poitrine du pasteur, un signe qui le désigne comme coupable – la lettre A bien sûr - , et pourtant, une fois encore, le narrateur se refuse à le dire explicitement. Page 356 : « et la révélation eut lieu ! mais il serait irrévérencieux d’en donner une description » = ellipse volontaire.

     

    B/ La conception de la justice divine

     

    Dans l’Evangile selon Saint Luc, le bon larron se repend, et le Christ répond : « aujourd’hui même tu seras avec moi dans le paradis » (Luc, 23, 39-43). Idée qu’on peut être sauvé in extremis.

    Or, page 358, à la question d’H., D. ne peut donner une réponse d’espoir : peut être faudra-t-il continuer à expier, même après la mort. La mort de D. est une « mort d’angoisse triomphante », et non de sérénité et de joie. La relation à Dieu dans La lettre Ecarlate = terreur et angoisse.

     

    Conclu.

     

    La Lettre Ecarlate est le seul des trois romans (Notre dame de paris d’HUGO & Le moine de Lewis) où le dénouement ne consacre pas la mort de tous les personnages principaux. Le pasteur meurt, mais la jeune femme en réchappe, ainsi que l’enfant, gage d’avenir. En outre, l’action se clôt sur une scène de rédemption sacrée, contre Le Moine et Notre Dame de Paris qui se terminent sur une scène d’apocalypse et de déchéance. Chez Hawthorne, c’est une ascension (on monte sur le pilori) et non une chute physique et morale comme chez Lewis et Hugo. Le dénouement est moins une disparition qu’un apparition, même si un doute demeure sur la justice ultime.

     

     

     

     

     


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  • FICHES DE VOCABULAIRE – ANCIEN FRANÇAIS

     

    ANGIN / ENGIN 

     

    Le lexème : Nom masculin + cas & nombre de l’occurrence.

     

    Origine : Il provient du latin INGENIUM ; ce nom était lui-même formé à partir de IN + GENO  qui signifie « engendrer », « créer », « faire naître ». INGENIUM désigne donc les « qualités innées d’un être humain », notamment ses « qualités intellectuelles innées », son « intelligence », son « talent », sa « créativité ».

    Dès le bas latin, ce terme assez abstrait à l’origine, se charge de notations plus concrètes et désigne une invention ingénieuse (avec une nuance péjorative il peut s’agir d’un piège) ou une machine, un instrument ( vu en tant que preuve concrète de l’ingéniosité humaine).

     

    Ancien Français : Le terme ENGIN garde ses acceptions abstraites et concrètes.

     

    Sens I : « qualité d’esprit permettant d’arriver à un résultat sans user de la force ».

    L’engin, c’est « l’intelligence », la « faculté de comprendre », « la capacité intellectuelle de résoudre une difficulté ». Dans ce sens de « ingéniosité », il se trouve en concurrence avec d’une part sens (de sensus) qui renvoie au bon sens pratique et à la finesse d’esprit, et d’autre part avec art qui désigne, conformément à son étymologie ars, artis, le savoir faire, l’habileté. Dans cette acception, engin s’oppose donc à force.

     

    Sens II :  (sens abstrait péjoratif) : engin désigne les manifestations blâmables de cette capacité mentale à obtenir ce que l’on veut sans se servir de la force, au sens de « ruse, stratagème, tromperie ». Cet important glissement vers une nuance péjorative s’explique à partir du sens I : au sens I, l’engin est ce qui permet aux êtres moins forts physiquement de prendre le dessus sur des plus puissants qu’eux. C’est donc le recours des faibles qui ne peuvent toujours être très exigeants sur les moyens utilisés.

    Dans cette acception, engin est en concurrence avec BARAT (« ruse, tromperie »), LECHERIE (ruse), LOBE ( « tromperie par des paroles »), LOSENGE (« tromperie par de fausses louanges » CF. Le Roman de Renart), GANCHE (« tromperie ») et d’autres termes relevant du vocabulaire de la tromperie.

     

    Sens III :  (sens concret) : engin renvoie aussi aux applications concrètes de cette qualité. Quoique moins fréquemment, engin peut désigner toute sorte d’objets, produits d’une conception ingénieuse, machines et instruments, notamment machines de guerre.

     

    Le succès du mot engin en ancien français est conforté par l’existence de plusieurs dérivés d’usage courant : le verbe ENGIGNIER (« fabriquer avec intelligence » et « tromper, duper »), le substantif ENGIGNIERE, ENGIGNOR (« trompeur »), l’adjectif ENGIGNOS (« ingénieusement conçu » et « rusé, trompeur »).

     

    Sens contextuel : à commenter selon le texte travaillé.

     

    Evolution : Elle se caractérise par une restriction de sens avec perte des valeurs abstraites à partir du moyen français.

    Sens I : disparu.

    Sens II : il ne subsiste que dans le proverbe mieux vaut engin que force. Au XVI° siècle, cette acception est sentie comme vieillie mais est encore attestée.

    Cette restriction s’explique par l’apparition de termes concurrents pour les acceptions abstraites de engin : astuce (emprunt tardif au latin ASTUCIA, « ruse »), habileté (néologisme savant de la fin du XVIII° siècle qui étend son emploi au XV°), ingéniosité (dérivé de engin créé en langue savante au début du XVI° siècle).

     

    Sens III : Au XVI° siècle, engin se trouve en concurrence avec machine (entré en langue au milieu du XVI° siècle avec son sens moderne). Au XVII°, engin subit une progressive spécialisation et désigne plus particulièrement des instruments utilisés dans  les domaines de la guerre, de la chasse et de la pêche. Il a souvent la valeur de « piège ».

     

    Actuellement, engin a toujours une valeur générique et désigne n’importe quelle mécanique à condition qu’elle possède une complexité dans la fabrication ou l’utilisation ; un complément vient préciser le domaine d’emploi de l’engin (engin de terrassement, engin de guerre…). Seul, le terme se teinte souvent d’une nuance péjorative (qu’est ce que c’est que cet engin ?).

     

    Parallèlement à cette évolution du mot engin, ses dérivés évoluent aussi : le verbe engigner tend à sortir de l’usage et au XVII° siècle, la langue le remplace par s’ingénier (relatinisation savante qui date du XV°). Le substantif engigniere, engignor disparaît au profit de l’ingénieur (relatinisation au XVI°) au sens de « inventeur, constructeur de machines ». Enfin, à l’adjectif ingenios se substitue ingénieux (relatinisation au XVI°) qui signifie « habile ».


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